Je suis tombé dans le chaudron du « spotting » il y a presque 9 ans déjà. C’est assez drôle, mais tout a commencé lorsque que j’ai obtenu mon permis de scooter. Habitant à 5 minutes de la base aérienne de Payerne, il est difficile de ne pas entendre les avions de chasse. Certains estiment ce son comme un bruit abasourdissant et d’autres, pour ne pas me citer, comme une belle musique.

Par curiosité, j’ai donc décidé un jour de les voir de plus près. Je suis tombé sous le charme de ces machines à la fois majestueuses, élégantes et pourtant incroyablement puissantes et violentes. M’étant rendu à l’aérodrome avec un petit appareil photo compact, c’est tout naturellement que j’ai pris quelques clichés. Une fois rentré à la maison et après quelques recherches sur internet, j’ai découvert qu’il y avait déjà beaucoup de mordus de photos d’aviation qu’on appelle les « spotters ».

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>Un F/A-18 des Forces aériennes suisses<

Mon inscription sur un forum dédié à cette nouvelle passion m’a permis de rencontrer par la suite nombre d’amis spotters. Malheureusement, je me suis rendu compte qu’avec mon petit appareil compact, j’avais l’air un peu « ridicule » à côté des objectifs longs comme un bras dont disposaient mes camarades.

Le matériel photo est un assez gros budget si vous souhaitez être équipé correctement. De nos jours, les spectateurs sont de plus en plus éloignés des pistes d’atterrissage et, lors de meetings aériens, les avions volent de plus en plus haut. Ceci demande donc la possession d’objectifs assez puissants permettant de zoomer sur les aéronefs.

Si votre objectif est d’acquérir du bon matériel neuf, comptez environ CHF 4000.-. Ceci représente un minimum, après il y a toujours la possibilité d’acheter des objectifs à plus de CHF 10’000.-.

Cependant, il existe désormais sur le marché de bons appareils photo compacts avec de bons zooms pour les budgets bien plus petits. Pour se lancer, pas besoin de dépenser des fortunes. Les appareils haut-de-gamme sont souvent complexes et nécessitent un peu d’expérience afin d’utiliser leurs capacités. J’aimerais également ajouter qu’une belle photo dépend plus du photographe que de l’appareil.

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>Un Gulfstream G650 à Samedan<

Un autre élément indispensable, à mes yeux, est une radio (scanner, récepteur). Elle permet d’écouter (seulement !) les conversations entre le pilote et le contrôle aérien mais permet également d’informer sur les pistes en service, la météo ou encore quels avions de quelles compagnies arrivent ou partent. Il y en a pour tous les budgets, mais pour du moyenne gamme, prévoyez CHF 100 à 200.-

Les conversations radiophoniques étant principalement en anglais, j’ai donc été plus que motivé à apprendre cette langue. D’ailleurs et pour l’anecdote, beaucoup de mes amis m’ont surnommé « Tower » parce que je suis toujours à l’écoute. Cette écoute attentive nous a permis plusieurs fois de ne pas louper de mouvements d’avion. Par exemple, nous attendions à Bâle l’arrivée d’un Antonov An225 et étions installés au bout de piste initialement prévue à cet effet. Soudainement, la piste en usage est modifiée, l’avion atterrit sur la piste opposée. Grâce à cette écoute, nous avons eu juste assez de temps pour partir et rejoindre l’autre côté afin de le photographier.

>Un vrai « Air-bus » A380<

En tant que spotter, j’aime aussi la photographie d’avions commerciaux. Genève-Cointrin et Zürich-Kloten n’ont plus aucun secret pour moi. Certains nomment les spotters d’avions de ligne : « les photographes d’autobus ». Je trouve ceci assez drôle et pas tout à fait faux : sauf que pour des « autobus », les avions sont drôlement rapides ! Il est donc vrai que le civil représente un tout autre monde que le militaire. Il est aussi toujours impressionnant de sentir la puissance et la taille gigantesque de ces avions de transports aérien.

Les spotters se déplacent parfois sur d’autres aéroports pour y photographier de nouveaux trophées. Par trophée, j’entends surtout la prise en photo d’avions (notamment de certaines compagnies) n’atterrissant pas sur nos aéroports nationaux. J’ai donc eu la chance de me rendre à d’autres grands « hubs » en Europe comme Francfort, Amsterdam, Paris Charles-de-Gaulle, Innsbruck, Marseille ou Manchester.

En Suisse, le spotting est assez répandu. Avec le temps, il est devenu rare que je me déplace sur un aéroport, civil ou militaire, sans que je rencontre des photographes que je connaisse déjà. Cela est d’autant plus vrai lorsqu’il y a des meetings aériens ou l’arrivée d’un avion spécial. Le spotting c’est comme la pêche, il faut être patient et nous ne savons pas toujours ce qui vient. Heureusement, il y a toujours une bonne ambiance pour faire passer les heures d’attente.

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>Arrivée surprise d’un Tupolev 154 de la compagnie russe Aeroflot<

Avec le temps, l’expérience que l’on accumule et le bouche-à-oreille, nous arrivons à savoir plus ou moins quand ces jets gouvernementaux ou avions spéciaux arrivent. Lors de l’annonce d’une telle arrivée, j’essaie d’arriver une à deux heures en avance sur place. Malheureusement, ces vols sont souvent en retard ou annulés.

Malgré les heures d’attente parfois par des températures négatives, il est toujours satisfaisant de regarder les photos faites la journée une fois arrivé chez soi. Après avoir regardé ses prises dans leur ensemble, nous commençons le triage. En moyenne, lors d’un meeting aérien, je compte environ 1’500 photos par jour. En ce qui concerne une journée de spotting normale, j’en compte 900.

Vous imaginez bien qu’il n’est pas possible de garder toutes les images. Entre les doublons, les photos troubles, ou encore mal cadrées, il y a beaucoup d’images à supprimer. Au final, j’en garde personnellement environ 20%. Avec l’expérience, nous devenons beaucoup plus sélectif et nous arrivons mieux à cerner quelles sont les meilleures photos. Comptez environ 2 heures de travail à la maison après une journée de photographie pour trier et éventuellement post-traiter les meilleures images.

Mais quels sont les buts d’un spotter ?

Les objectifs diffèrent pour chaque personne. Certains veulent juste voir un maximum d’avions et noter leur immatriculation sur un carnet (plus fréquent chez nos amis britanniques). D’autres veulent une belle photo latérale de ces avions pour que l’immatriculation soit visible et ainsi en accumuler un maximum. Et la dernière catégorie se concentre plus sur une belle image, sans forcément prendre en compte l’immatriculation ou si cet avion est rare ou non. Toutefois, les avions  spéciaux intéressent en général tous les types de spotters. Il y en a pour tous les goûts.

>Arrivée à Zürich d’un Boeing 747 spécial du gouvernement américain<

En tant que spotter, il faut savoir que cette passion ne sera pas de tout repos. Les appareils peuvent arriver en tout temps. Il n’est donc pas rare de se lever tôt (4h-5h du matin) et de faire plusieurs kilomètres pour se rendre à l’aéroport. J’estime faire environ 10’000km par an juste pour le spotting. Mais comme vous le savez déjà, cela dépend de vos envies et disponibilités.

Mais est-il possible de gagner sa vie avec de la photographie d’aéronefs ? A ma connaissance, il est très rare d’en faire son métier surtout si vous restez sur de la photographie. Mais « rien » n’est impossible non ?

Pour résumer, le spotting c’est des heures d’attente parfois dans le froid ou sous un soleil de plomb car il n’y a pas toujours la possibilité de s’abriter. Le spotting c’est aussi des kilomètres pour rentrer parfois bredouille. C’est également du matériel souvent coûteux. Mais le spotting, c’est avant tout beaucoup de rigolades au bord des pistes et des contacts dans le monde entier.

Quelle est ma plus grande satisfaction ?

Ma plus grande satisfaction, c’est lorsque des pilotes me demandent des photos de leur avion lorsqu’ils sont en vol. Comme c’est le cas pour beaucoup de spotters, nous offrons volontiers ces photos aux pilotes.

N’hésitez pas à faire un tour sur mon site internet et regarder quelques-uns de mes clichés : Tigerpic